Un blog Transilien SNCF Voyageurs pour Île-de-France Mobilités

Retour sur le Temps des Feuilles Mortes et des Grands Gibiers

feuilles-mortesEn ce début de décembre, le froid s’installe et les dernières feuilles tombent des arbres : l’automne touche à sa fin.

Dans le milieu ferroviaire, l’automne est une époque particulièrement redoutée, à cause des feuilles mortes et des grands gibiers. C’est une saison qui est anticipée tous les ans avec la mise en place de mesures préventives. Celles-ci permettent de limiter l’impact sur la circulation, mais ne peuvent supprimer complètement le problème.

Certains d’entre vous se sont étonnés, sur le blog et sur Twitter, des répercussions que pouvaient entraîner les feuilles mortes ou les grands gibiers sur les circulations. A chaque saison, nous anticipons les problèmes récurrents et spécifiques à cette période et faisons de notre mieux pour en limiter les conséquences. Notre champ d’action reste néanmoins restreint aux moyens technologiques et logistiques dont nous disposons aujourd’hui.

Je vous propose donc ce billet pour vous donner quelques éléments d’explication et vous aider à mieux comprendre les difficultés que vous avez pu rencontrer ces derniers mois : ce que nous avions mis en place en amont pour en limiter les conséquences au minimum, tout comme nous le faisons pour la saison froide qui débute.

 

Quel impact sur les circulations ?

Avec la chute des feuilles mortes et la pluie, les conditions de circulation sont semblables à celles d’une route verglacée. Les feuilles tombées sur les voies sont en effet broyées par le passage des trains. Elles forment alors une « pâte végétale » qui nuit à l’adhérence des trains sur les rails.

Deux phénomènes dangereux peuvent alors survenir :

pate-vegetale-rail

Pâte végétale sur le rail

 

  • Le patinage en phase d’accélération : les roues tournent dans le vide en raison d’un manque d’adhérence sur les rails, à l’instar d’une voiture sur une route embourbée. (Vous pouvez voir ce phénomène de plus près dans cette vidéo)
  • L’enrayage en phase de freinage : les roues se bloquent et le train glisse sur les rails, comme le ferait une voiture sur une route verglacée.

 

Par mesure de sécurité, l’allure est donc modérée lors des phases d’accélération pour prévenir le patinage, et les phases de freinage sont allongées pour prévenir l’enrayage. Cela provoque bien souvent des retards, qui sont néanmoins nécessaires pour votre sécurité.

 

Un autre problème récurrent en automne est la présence de gibiers. (Oui, un simple sanglier peut provoquer de grosses perturbations sur le réseau SNCF, aussi absurde que cela puisse paraître).

Impact d'un sanglier à l'avant d'un train

Impact d’un sanglier à l’avant d’un train

Aujourd’hui, on ne compte pas moins de 2 millions de sangliers en France. Il s’agit d’un véritable problème national qui impacte tout le trafic ferroviaire. A cette époque de l’année, alors que les grosses chaleurs deviennent un lointain souvenir et que la saison de la chasse bat son plein, les sangliers et autres gros gibiers sont repoussés aux abords des voies. En 2015, ce sont 1132 animaux qui ont été heurtés sur l’ensemble du réseau ferroviaire national.
Les impacts d’animaux (sangliers, biches, cerfs, etc.) fragilisent le matériel et les infrastructures (à l’instar d’un choc avec le pare-choc d’une voiture). Par mesure de sécurité, les trains concernés sont donc immobilisés, ce qui provoque des retards et suppressions.

 

Quelles sont les mesures mises en place ?

En prévision de la saison automnale, les équipes de défrichage et d’élagage sont mobilisées dès l’été dans les zones à risques. Mais nous ne pouvons agir partout, car les zones boisées aux abords des chemins de fer n’appartiennent pas toutes à la SNCF. (Oui, nous avons conscience de la présence d’arbres à proximité directe des voies, mais nous n’avons pas le pouvoir de les défricher ou de les élaguer).

  • Elagage des arbres et ramassage des feuilles

Dès l’été, des campagnes de surveillance, d’élagage et d’abattage des arbres sont organisées. Une débroussailleuse mécanique est utilisée depuis les voies lorsque celles-ci le permettent. Sinon, c’est un débroussaillage manuel qui est réalisé pour les arbres dangereux ou inaccessibles depuis les voies. Ces mesures ne peuvent être appliquées que dans les zones appartenant à la SNCF.

  • Trains « Karcher »

train-karcherIl s’agit d’un « train laveur » qui nettoie les voies grâce à un jet d’eau haute pression (puissance de 1000 bars), en avançant à 25 km/h. 14 trains Karcher arpentent, de nuit, tout le réseau Transilien : ils passent 1 fois par semaine dans votre région de Paris-Est.

Cela permet d’éliminer les débris végétaux en procurant ainsi une meilleure adhérence des trains, comme vous pouvez le constater dans cette vidéo.

  • Système ABS et sablage des voies

sablageSNCF Transilien a équipé ses trains de systèmes anti-patinage, et ce depuis quelques années maintenant (je reçois encore des commentaires me demandant pourquoi le sable n’est pas utilisé : et bien si, on s’en sert !). C’est l’équivalent de l’ABS sur les voitures.

Les locomotives sont aussi équipées d’un dispositif qui permet de projeter du sablage devant les roues motrices, pour accroître l’adhérence sur les rails, en cas de début de patinage. Des cuves de sables sont installées et remplies dans les trains.

  • Une période agitée pour la maintenance

Il arrive néanmoins que ces mesures de sécurité préventives ne suffisent pas, et de lourds actes de maintenance doivent alors être réalisés.

meplatLors des phases de freinage en particulier, lorsque la perte d’adhérence est trop forte, un « freinage renforcé » peut s’imposer. Et quand les roues se bloquent pour freiner, le train continue d’avancer, ce qui provoquer des dégâts importants sur les roues, les essieux et éventuellement les rails. Il se forme alors un « méplat » au niveau du point de contact avec le rail, et la roue n’est plus ronde : il s’agit du phénomène de la « roue carrée ».

 

Dans ces cas-là, les roues concernées sont envoyées au centre de maintenance où une machine-outil spécialisée s’occupe de leur reprofilage (cette vidéo vous en explique le fonctionnement). Si la dégradation est trop grave et qu’elle suppose un changement des roues et/ou essieux, la rame est retirée de la circulation le temps que la maintenance soit effectuée. Cela peut mener à une modification du plan de transport, avec des modifications de composition, voire même des suppressions.

Les équipes de maintenance sont donc grandement mobilisées pour réparer les incidents techniques dus aux feuilles mortes : elles passent d’un rythme de travail en 2×8 6j/7, à un rythme en 3×8 pouvant aller jusqu’à 7j/7.

sncf_preuve_securite_train_fre

 

D’autres dispositifs sont déployés face à la présence des gibiers

  • Des gardes-chasses dédiés

Depuis janvier 2011, 2 gardes-chasses ont pour missions de débroussailler et renforcer les clôtures aux abords des voies, d’organiser des battues pour repousser le grand gibier (sanglier, cerf, etc.) et de faire du repérage préventif grâce à des caméras thermiques.

Depuis la mise en place de ce dispositif, la diminution du nombre de collisions est estimée à 20%, avec 2 fois moins de trains en retard.

  • Des infrastructures adaptées

Les espaces qui peuvent constituer un point d’entrée pour les animaux sont aménagés, par exemple en renforçant les clôtures, et des tremplins sont mis en place pour faciliter la sortie des animaux présents à proximité des voies.

Des catadioptres sont posés sur les poteaux caténaires dans les zones à risque. Ils sont destinés à effrayer le gibier grâce aux éclats provoqués par les projecteurs des trains.

  • Des dispositifs expérimentaux

Une application mobile expérimentale est en cours de création pour permettre aux « chasseurs SNCF » de mieux cibler les zones à risques, de faire circuler les informations plus rapidement et d’utiliser les données enregistrées sur fonds cartographiques. A terme, cela permettra d’adapter les aménagements et les actions à chaque zone de manière plus efficace.

garde-chasse

 

Malgré toutes ces mesures de prévention et les dispositifs déployés, nous ne pouvons pas contrôler la nature : les aléas liés à la météo et aux animaux sauvages ne peuvent pas tous être anticipés. C’est pourquoi vous avez pu subir des retards voire mêmes des suppressions, à cause des « conditions météorologiques ».

Mais nous avons fait au mieux pour limiter les conséquences, et tous les moyens ont été mis en œuvre pour faire face à ces importantes contraintes automnales.

 

De même tous les moyens sont mis en œuvre depuis quelques semaines pour faire face à la saison hivernale qui arrive. J’ai conscience de la frustration que vous pouvez ressentir lorsque vous empruntez un train qui n’est pas chauffé… Mais sachez que la maintenance reste sur le pied de guerre durant cette période.

En amont de la saison froide, un contrôle de l’intégralité du parc est réalisé depuis le mois d’octobre et jusqu’au 15 décembre, afin de procéder à une remise à niveau du parc et appliquer une maintenance préventive. Des travaux correctifs sont également réalisés après les signalements, remontés par les conducteurs ou par les clients comme vous. Ceux-ci sont traités dans un délai allant de 2h à 2j, suivant l’exploitation du matériel.

Seules 20% des avaries remontées sont confirmées.

En effet, comme dans tous les systèmes de chauffage, il existe une régulation afin de maintenir la température au plus proche de la température réglementaire (de 19°C). Cela peut amener à des phénomènes de soufflage d’air froid, dont la température est légèrement inférieure à la température réglementaire, mais nécessaire pour parvenir à une température ambiante correcte dans l’ensemble de la rame.

 

J’espère avoir pu apporter des éléments de réponse aux éventuelles questions que vous vous posez.

N’hésitez pas à me faire part de vos remarques et suggestions, par exemple par rapport à l’utilisation du motif des « conditions météorologiques » dans les annonces réalisées : ce motif est-il trop vague ? incompréhensible ? que proposez-vous pour le rendre plus clair tout en restant bref ?

10 commentaires pour “Retour sur le Temps des Feuilles Mortes et des Grands Gibiers”

  1. Gulliver12Passer au statut dit :

    Bonjour, il me semble que les motrices auparavant pouvaient projeter du sable devant les roues , ce qui permettait d’éliminer les feuilles mortes . Est ce parce que cela n’existe plus que les feuilles mortes sont redevenues un problème ? Je ne me souviens pas avoir été alerté une seule fois de toute mon enfance jusqu’à il y a une dizaine d’années sur ce problème.

    • LaetitiaPasser au statut dit :

      Bonjour @Gulliver12,
      Les matériels de « filiation » TER (RIB, AGC et Tram-trains) sont effectivement équipés de sabliers qui projettent du sable à l’avant des roues. Ce système est encore utilisé, notamment sur les portions à forte pente. (Nous sommes d’ailleurs l’une des dernières régions où les rames sont encore sablées)
      Au contraire, les rames automotrices modernes (MI2N, Z2N et NAT (Franciliens)) ne sont pas équipées. Cela s’explique par la fréquence des phases de freinage et d’accélération, qui ne permet plus d’utiliser ce système de manière efficiente.

      Les difficultés liées aux feuilles mortes existent depuis toujours : on l’explique plus longuement et en détails aujourd’hui, par rapport à il y a 10 ans par exemple. De plus, la fréquence des trains a considérablement augmenté ces dernières années, ce qui rend plus difficile le nettoyage des voies (pour retirer les « pâtes végétales » qui s’accumulent). C’est pourquoi on peut avoir le sentiment que le problème des feuilles mortes est un « nouveau » problème.

  2. Jéré dit :

    Bonjour Laetitia,
    Samedi soir la rame 91HE était dans un état pas possible avec du vomi, des papiers un peu partout…

  3. Gulliver12Passer au statut dit :

    Bonjour Laetitia,
    je vous remercie pour vos explications qui sont parfaitement claires .
    Je me suis un peu documenté par ailleurs sur l’adhérence train rail et effectivement il semble que le problème soit complexe et non résolu depuis l’origine.
    Il faut privilégier l’adhérence au détriment de l’accélération ou inversement . La solution optimum passant par un sablage dosé en fonction des phases et non linéaire comme souvent. Ce que je comprends néanmoins c’est que la fréquence importante des trains ne permet plus d’utiliser le sablage autoporté donc il nous reste trois solutions :
    1) moins de trains mais à l’heure:-(
    2) même nombre de trains mais plus de voies ( notamment viaduc de Nogent) donc très cher
    3) même nombre de trains et de voies mais pilotage informatisée des phases d’accélération et de freinage pour optimiser le temps
    Je crois deviner vers où nous finirons par aller.

    • LaetitiaPasser au statut dit :

      Bonjour @Gulliver12,
      En effet, la maîtrise de l’adhérence dans les phases d’accélération et surtout de freinage est primordiale pour assurer votre sécurité. C’est ce qui explique que des retards peuvent être nécessaires lorsque les conditions météorologiques sont mauvaises.

      Par ailleurs, même si le sablage semble être LA solution « parfaite » pour augmenter l’adhérence des roues et pallier le problème des feuilles mortes, il comporte malgré tout de nombreux inconvénients.
      – Il est interdit de l’utiliser dans les aiguillages, car il peut abîmer les aiguilles.
      – Le sable étant composé de silice, il agit comme un isolant entre les roues et le rail, ce qui peut empêcher de détecter la présence d’un train (c’est-à-dire qu’on ne sait plus exactement où il est situé pendant quelques secondes).
      – Ce système nécessite de réapprovisionner les cuves tous les soirs, ce qui est extrêmement difficile à faire avec le trafic d’aujourd’hui.
      C’est pourquoi, sur les nouvelles rames, la motorisation est privilégiée par rapport au sablage.

      Concernant l’automatisation des trains, il s’agit effectivement de la piste exploitée aujourd’hui pour optimiser le débit des trains. Tout comme le sont les lignes 1 et 14 du métro, le RER E sera automatisé lorsqu’il circulera dans le tunnel souterrain (après sa prolongation jusqu’à La Défense).
      En extérieur, cette automatisation est toutefois plus compliquée à mettre en place, notamment à cause des aléas qui peuvent compromettre les calculs des phases de freinage notamment. (On ne peut pas se permettre la moindre erreur, puisqu’un train qui s’arrêterait un peu trop tôt ou un peu trop tard impliquerait la présence de personnes sur les voies…)
      Mais sachez que ces pistes sont bien étudiées 🙂

  4. georges dit :

    et ce soir, après ce matin, après hier, ça recommence, panne de train à Haussmann saint Lazare, fin « on verra » à 18H30. Veuillez SVP respecter ne serait ce qu’UN JOUR les horaires et les salariés qui finissent leur journée après avoir galéré dans votre ligne à bout de souffle déjà ce matin

  5. ZigZag dit :

    Houlala les feuilles ça glisse et les biches ça gambade, c’est vilain vilain !
    Attention les enfants !
    (Par contre les pannes matin et soir RAS, suffit d’attendre comme chaque fois plantés sur les quais comme des glands. On reste dans le registre champêtre)

  6. UsagerUsagé dit :

    Et ce soir distribution de chocolats à la sortie de la gare de Pontault. N’avez vous rien d’autres à faire du temps de travail de vos agents sur cette ligne???

Les commentaires sont fermés.

Vos communautés en ligne
Ensemble sur la ligne A Ensemble sur la ligne B Ensemble sur la ligne C Ensemble sur la ligne D Ensemble sur les lignes E et T4 Ensemble sur la ligne H Ensemble sur la ligne J Ensemble sur la ligne L Ensemble sur les lignes N et U Ensemble sur la ligne P Ensemble sur la ligne R